Discours de la présidence sur la prévention des génocides à l’ère des nouvelles technologies

15 décembre 2022
Le 12 décembre 2022, la présidente de GAAMAC, Silvia Fernandez, a été invitée à prendre la parole lors du 4e Forum mondial contre le crime de génocide à Erevan, en Arménie.

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M. le ministre des Affaires étrangères,

Excellences,

Mesdames et Messieurs,

Je suis honorée de participer à ce 4ème Forum mondial contre le crime de génocide, en ma qualité de présidente de l’Action mondiale contre les atrocités de masse, connue sous le nom de “GAAMAC”.

GAAMAC est un réseau mondial d’États, de sociétés civiles et d’institutions académiques qui cherchent à promouvoir l’établissement d’architectures et de politiques nationales pour la prévention du génocide et d’autres crimes d’atrocité. GAAMAC est une initiative menée par les États, composée de 12 membres du groupe de pilotage, de 23 partenaires et de trois alliances informelles avec des organisations intergouvernementales, dont l’UNESCO, l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE.

Le GAAMAC est fier de travailler avec le bureau du conseiller spécial des Nations unies pour la prévention du génocide, Mme Alice Nderitu, qui est parmi nous aujourd’hui. GAAMAC est également très heureux de compter l’Arménie, notre hôte, parmi ses États partenaires.

Je félicite les organisateurs d’avoir axé ce Forum sur la prévention des génocides à l’ère des nouvelles technologies.

Le génocide ne naît certainement pas des nouvelles technologies. Il suffit de regarder l’histoire pour reconnaître que le mal ne dépend pas de moyens sophistiqués pour se matérialiser. Cependant, il est évident que la technologie peut contribuer à diffuser les préjugés, à faciliter les liens entre leurs promoteurs et à amplifier la capacité de destruction de l’homme. Les nouvelles technologies font sans doute partie du problème.

Toutefois, comme en témoigne l’excellent programme de ce Forum, les nouvelles technologies peuvent également faire partie de la solution en fournissant des outils formidables pour prévenir les génocides, protéger les sociétés et faire progresser les efforts de responsabilisation, notamment par la production de nouvelles formes de preuves pour documenter les crimes et traduire les auteurs en justice.

Comme on le sait maintenant, un génocide ne se produit pas du jour au lendemain. C’est l’aboutissement d’un long processus, qui commence souvent par des mots, par des messages haineux. Comme l’ont montré les expériences tragiques récentes, de tels messages peuvent être transmis efficacement par des moyens de communication conventionnels, voire rudimentaires. Cependant, il est clair que les nouvelles technologies, qui ont radicalement changé notre façon de travailler et de communiquer, renforcent la capacité à transmettre, amplifier et générer des préjugés et de l’intolérance, qui peuvent potentiellement dégénérer en violence et en crimes de masse.

GAAMAC reconnaît dans le discours de haine un précurseur très sérieux de la violence et cherche à contribuer activement aux débats actuels sur cette question. L’année dernière, elle a consacré l’intégralité de sa quatrième conférence mondiale à des discussions sur le “renforcement des efforts nationaux pour lutter contre les discours de haine, la discrimination et prévenir l’incitation”.

Dans les travaux qui ont précédé la conférence et dans le cadre de ses suites, GAAMAC a mobilisé sa communauté autour de cette thématique tout au long des années 2020 et 2021. Entre autres initiatives, GAAMAC a organisé une série de discussions en ligne portant spécifiquement sur le “décodage des discours haineux” avec son partenaire, l’Institut montréalais d’études sur le génocide et les droits de la personne (MIGS).

Comme ce sujet occupera également l’un des panels de ce Forum, j’aimerais partager quatre recommandations principales émanant de ces séries en ligne qui pourraient être utiles pour la suite des discussions :

Premièrement, la technologie peut être utilisée comme arme. La principale différence entre les discours de haine en ligne et hors ligne est la portée et l’ampleur que les plateformes de médias sociaux offrent. Un individu peut non seulement être un consommateur mais aussi devenir un producteur anonyme de contenus dangereux ayant une portée plus grande et potentiellement transnationale.

Deuxièmement, la technologie peut être un amplificateur utile de contre-récits, c’est-à-dire “faire partie de la solution”. Les outils en ligne peuvent en effet être utilisés pour la vérification des faits afin de contrer les discours de haine et les effets néfastes de la désinformation. La technologie peut également être utilisée pour surveiller les discours de haine en tant qu’indicateur d’alerte précoce de la discrimination et de la violence potentielle.

Troisièmement, l’autorégulation par les grandes entreprises technologiques ne suffit pas. Ils ne sont pas correctement équipés pour détecter les discours de haine spécifiques au contexte. Les plateformes de médias sociaux doivent donc adapter et appliquer des politiques conformes aux normes internationales.

Enfin, une bonne nouvelle, la surveillance des médias sociaux pour détecter les discours haineux et les incitations à la haine a contribué à réduire la violence dans certains pays pendant les élections. Cependant, le droit à la liberté d’expression doit toujours être respecté dans la lutte contre les discours de haine. En effet, dans certains cas, la fermeture des médias et des médias sociaux a suscité des inquiétudes quant au risque de limiter la liberté d’expression et les médias.

Je suis convaincu que nous aurons l’occasion d’explorer en profondeur ces conclusions et d’autres sujets importants couverts par ce Forum. Je me réjouis de nos discussions.

Je vous remercie de votre attention.

 

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